Sans rêve pour gêner

Je me demande si un jour, je ne te dirai pas merci. Tu demanderas sûrement pourquoi et sûrement que je ne saurai pas vraiment d’exposer la raison. Ce n’est pas que je ne la sache pas, c’est plutôt que je ne saurai le mettre en mots pour que ce soit compris. L’idée, ça ne sera même pas que tu me répondes “De rien.” comme si les choses allaient de soi. Ce ne sera pas non plus fait pour t’embarrasser.

Je n’ai pas la prétention de m’imposer à toi d’une manière quelconque. Je crois juste qu’il y a un état de fait qui mériterait d’être souligné. Peut-être, serait-ce une manière de ma part de te traduire de façon détournée que je t’ai redécouverte, ou plus exactement, que tu as dépassé l’image que je pouvais me faire de toi. Parce qu’il faut bien le reconnaître : qu’on le veuille ou non, on enferme souvent “l’autre” dans une certaine projection dont on est persuadé qu’il sera incapable de sortir. C’est d’autant plus vrai lorsqu’on a passé du temps ensemble en toute proximité. Et on se ment. Ou plutôt, on se protège contre notre propre incapacité à laisser “l’autre” le temps de nous parler, de nous traduire d’une manière plus ou moins adroite ce qu’il a au fond de lui. On va se fâcher avant même qu’il ait dit ses trois premiers mots et quand bien même, il dirait les phrases que nous attendions, nous lui dirons qu’il n’a pas à se forcer à être “gentil”… Comme s’il était impossible que cela puisse être un acte “non réfléchi”. Le plus “marrant” dans l’histoire, c’est que certains diront que c’est leur impulsivité, leur côté “irréfléchi”, leur “affect” qui les poussent à agir ainsi. Alors que si on se pose trois secondes…. C’est tout l’inverse. Qu’y a-t-il “d’irréfléchi” dans cette attitude ? Rien… C’est un comportement tout ce qu’il y a de plus formaté, “réfléchi” à l’avance… Si vraiment, c’était l’affect qui guidait ce genre de geste, il prendrait en compte l’autre et son état “sensible” à cet instant précis. Or on est là dans la négation complète de cette situation.

Ce que je te laisse aujourd’hui comme liberté (et réciproquement), c’est une manière de me laisser t’aimer à ta “sauce”… Je ne plaque plus mes espoirs, mes lubies, mes caprices ou mes inquiétudes sur toi. C’est toi qui t’exprimes et non la projection que je me fais de toi… Et ça, c’est juste “beau”. Je ne sais si on peut trouver un autre terme pour le dire mais je crois que non.

Alors pour en revenir à mon “merci”… Voilà, ça vient de là et tu sauras bien tout ce qui en découle. Je crois que je n’ai jamais cru que nous pourrions avoir ce rapport-là. Je crois aussi que je ne me suis jamais dit l’inverse non plus. Mais il y avait une espèce d’évidence latente contre laquelle je ne pouvais rien faire qui m’empêchait de me dire tout simplement “Pourquoi pas ?”

Alors je voudrais te dire “merci” oui… Juste au présent, sans présager de demain. Sans me dire que mes rêves pourraient très bien se réaliser et sans me dire le contraire non plus.

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