Imphonie* à quatre temps

Pour un peu de sel bleu,
Laisse-moi te conter

Les lèvres enscellées
Par le dégoût des ans,
Le myocarde ancrant
Ma gorge ensanglantée,
Je goûte encore l’eau
Qui souillent ces fontaines,
Cueillant avec leurs faux
Les roses bleues verveine
De ma voix sans reflet.

J’ai passé tant d’années
A reluquer les blanches,
A ramasser les croches
Sur des pianos usés
Comme un hère à la manche,
A offrir mes partoches
Aux lits des effacés.

Mes doigts se sont plantés
Dans la paume des notes,
Et j’ai pris l’asymptote
De ces ondes tuées
Par le fléau des vents
Cascadant sur l’abîme,
Dont les parois d’argent
Reflétaient en la rime
Le désir de l’archet.

Férocité des mots
Fit « licité » des âmes,
Et Dame de l’impôt,
L’opacité se pâme
En hymne de vertu
Lorsque son chant s’éprend
D’une ronde têtue.

Dès lors je n’ai rien su,
Pas même offrir audience
Aux cordes d’un violon,
Qui me disaient la rue,
Les boulevards immenses
Des havres de passion.

J’ai abhorré les unes
En déchiffrant l’agence
gravée dans les cambrures
Des rangées de lacunes,
Au son de ces offenses
Lignées aux tablatures

J’ai enterré la note,
Sous des plages minées
Déserté l’euphorie
Des non-dits en pelote,
Mis le point sur le I
Au chant du mal-aimé.

Je me suis fait silence,
Pour le prix d’un baiser
Clos entre deux planchers,
Engourdi d’une absence,
Celle que j’étourdis
Pour un peu de musique,
Celle au Nord, celle enfouie,
Dans le ventre tragique
D’une gamme à crochet…

L’écho était en blanc
En Melody Nelson,
Le rêve agonisant
En mal de Parkinson,
Et « moi-je » sur le banc
En wait que Baby Run.

Vois-tu comme fut bref
Ce soupir, cet instant,
Ritournelle d’éther,
Madison sans grief,
Un woogie au tympan
Tuant mon boogie d’hier…

Aux perles d’océan
qui glissent à l’équerre
Qui retourne à l’essence,
Et pointe au firmament
Qu’on voudrait d’or refaire,
Éclissés d’innocence.

J’ai écourté la nuit
En attendant l’hiver,
Obsidien univers
Fredonnant sur un puits
Creusé dans tes prunelles,
Aux sombres couturières,
Un no man’s land rebelle
Se saccade en arrière
Métronom’ désuet.

J’ai mal de ces carences,
Et fleure la portée
Des noires pour la science,
Des blanches emportées,
Mon artifice en feu,
Ma lys au petit jour,
Écoute-moi un peu
Au refrain du détour

Lunastrelle & Tilou8897

(août 2010)

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