Ton porte-clés

Il y a des dates qu’on devrait oublier mais qu’on passe notre temps à se rappeler. Je sais que je n’ai plus aucune raison pour te souhaiter ton anniversaire. Mais que veux-tu ? Ça serait bête de ne pas le faire. Je ne sais pas si toi, tu as fini par régler la question, sûrement que oui, sûrement mieux que moi. Moi aussi, quelque part… Même si je ne sais pas le dire, même le souvenir de toi me ramène au souvenir de lui ou elle. Je n’y peux rien. Je ne sais même plus s’il faut au final que je sois triste ou heureux quand cela me revient. Je crois qu’on ne peut pas mettre un pansement sur ce qui n’a jamais eu le temps d’être une plaie. Ou peut-être qu’il y en a eu une : plaie. Mais je n’en ai jamais rien su. Tu vois, c’est étrange quand même. Je ne sais pas vraiment pourquoi, je n’ai pas vraiment regardé à quelle fréquence… Mais je fais toujours ce rêve… Ce cauchemar devrais-je dire, et je me réveille en sueur avec l’impression d’un vertige. J’ai ce rouge qui remplit mon champs de vision et je vois tes yeux, ton visage, cette expression. C’est entre la douleur, la colère, la tristesse et le désespoir. Tu me regardes droit dans les yeux et tu cherches une réaction, un indice qui pourrait te faire dire : « oui », « non », « il a compris », « je l’ai touché »… Ou pas. Mais tu cherches dans la lueur de mes pupilles et là, il n’y a rien. Il n’y a jamais rien eu. S’il faut me sonder, il faut me sonder de l’intérieur ou il faut apprendre à lire sur tous mes extérieurs. Les indices que je sème car la pudeur, la peur de cette violence qui ronge mes intérieurs, m’interdit de l’exposer. Il y a des dates qu’on devrait oublier mais il y a des personnes qu’on ne peut pas. Des non-personnes aussi. Et lorsqu’on leur a donné tout, même un instant, on ne peut jamais le reprendre ou l’enterrer. Sûr qu’au final, ça ne change rien mais, justement. Ça ne change rien alors on doit ou on peut. J’ai toujours ce fichu porte-clés, cette « tétine ». Elle a été brisée, cette année, et je me suis dit que c’était peut-être un signe. Mais je ne me suis pas résolu à la jeter. J’ai déménagé et elle repose encore sur le dessus de la télé que je n’ai jamais rallumée. C’est le seul élément concret qui me permet de me rappeler, qui me permet de savoir qu’il/elle n’était pas un mensonge. Je ne sais pas pourquoi, je te raconte cela. Ce sont des choses « vieilles » à l’échelle de ton temps. Elles n’ont plus à avoir d’importance pour toi. Vis ta vie. Bon anniversaire, Ma Ny.

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