Ici, on ne regarde pas la chose, on passe à la suivante.

Ici, on n’essaie pas, on fait. Là-bas, tu en rêvais, ici, tu ne l’as pas et tu feras en sorte de t’en passer. Il n’y a pas grand chose à dire lorsque les choses sont ainsi, posées avec des règles qu’on ne peut pas contourner. Je ne suis pas d’ici. Alors je regarde. Je suis spectateur de ce film. Il n’est ni triste, ni joyeux. C’est ainsi.

Moi…. Je suis de là-bas. Je n’ai pas de vie, ici, pas d’attache. Juste des cordes à noeuds. Des noeuds que je noue et qui m’aident à respirer. Je n’ai rien à dire sur ici si ce n’est que les amabilités ordinaires.

“Qu’est-ce que tu en penses ?”

C’est la question qui revient sans cesse. Comme si elle pouvait changer le cours des choses. Et puis si tu dis les choses, on va te demander de quoi tu t’occupes, on va te dire que tu n’as pas le droit de dire cela, et au mieux, on ne va tout simplement pas comprendre.

Si un jour, on me demande ce que j’ai vécu, je pense que je répondrais : “rien”. J’ai passé mon temps à faire. Faire ce qu’il fallait. Faire ce que tout le monde refuse parce que cela empiète sur l’horizon banal de leurs possibles.

Je me restreins plus qu’à cela. Je crois que c’est mon “job”. En déroulant la pellicule à l’envers, c’est une évidence. Je me rappelle encore de ta question : “C’est quoi tes rêves ?”

Je me rappelle du silence.

“Les siens, les tiens… Les autres…”

Je me rappelle ta mine un peu déconfite et mon sourire pour te dire qu’il n’y avait rien de grave dans tout ça.

“Mais comment ?…”

Comment cela arrive ? Je ne peux pas te l’expliquer en un quart d’heure. Tout ce que je peux dire, c’est qu’il y a certaines circonstances qui font qu’on se rend compte que la beauté n’est pas dans l’éternelle construction, déconstruction pour faire croire que l’on a bâti quelque chose. La beauté est dans le quotidien, dans les entrechats que l’on fait pour que la note soit juste, même si la figure en elle-même est quelque chose qui tient de l’équilibrisme.

“Alors ça te fait quoi ?” m’a-t-elle demandé, figure-toi….

Je n’ai pas répondu et j’ai juste souri. S’il avait fallu que je lui dise que cela me renvoyait à un acte manqué, elle m’aurait dit que je gâchais la fête.

Ici, on ne regarde pas la chose, on passe à la suivante.

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