C’est ma main dans la tienne qu’on va laisser au vent.

Laisse-moi ce silence dans lequel je ne vois rien, dans lequel je m’angoisse et je doute de l’après. Comme si l’absence de promesse obstruait le fait de penser qu’il puisse y avoir un avenir. Je ne te parle pas d’un ligne tracée avec d’ores et déjà toutes ces formes, ces circonvolutions et sa fin. Il y a toujours une fin lorsqu’il y a eu un début. Je n’ai guère de doute là-dessus. Si je te dis que tu me manques, tu vas dire que j’exagère ou que ce n’est que mon problème. Et tu auras peut-être raison après tout. C’est le principe de la consommation. C’est jetable. C’est un peu comme ces sacs plastiques qu’on ramène du supermarché. On sait qu’ils ne seront pas à nos côtés toute notre vie mais on les garde car ça peut dépanner. C’est une vision très utilitaire mais quelque part, elle ne laisse pas de place à l’idée affective.
Moi, je conserve, tu le sais bien, même les mots écrits sur un bout de sopalin qui a failli brûler sous la menace d’une cigarette. Mais je n’avais pas assez de colère en moi pour le faire. Je n’avais pas assez d’envie pour effacer ce qui avait été pour moi, un instant entre les autres. Je me dis parfois que la mémoire est une chose dont on devrait se défaire. Mais en a-t-on le droit ? Est-ce bien honnête ? Quand on oublie une chose, c’est un peu comme si on lui donnait la mort. Son existence s’arrête. Alors peut-être faut-il avoir le tempérament d’un assassin pour savoir le faire. Ne pas avoir de scrupule à dire une chose puis quelques mois, quelques jours ou bien quelques années plus tard, dire le contraire. Mais ce n’est même pas là la question. Ce n’est pas la contradiction qui pose souci. C’est le reniement. La contradiction, peu ou proue, on finit toujours par l’accepter car même si elle dénonce le caractère futile de la parole et surtout, le peu de valeur que certains lui accordent, le reniement, c’est tout autre chose.
“Merci pour elles”, tu me dis souvent alors que “Merci”, cela serait beaucoup simple. Et surtout beaucoup plus proche de la réalité objective. C’est vrai qu’en utilisant ces mots, ça permet de dire des choses sans vraiment les dire mais cela reste malhonnête. Je ne fais pas les choses “pour elles”. Resteindre les faits à ceci, c’est quelque part jouer avec des matières qui ne sont pas faites pour ça. On peut jouer dans n’importe quel autre domaine, on pourrait même faire “semblant” dans d’autres théâtres. Mais là, c’est notre pièce, c’est notre scène et surtout ma main dans la tienne qu’on va laisser au vent.

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